L'Empreinte du silence | Didier Robert
Je savais que grand-père était mort pendant la guerre, mais j’ignorais les circonstances de son décès. La famille n'en parlait jamais. Pour l'enfant que j'étais, il était le monsieur de la photo posée sur la table de chevet de ma grand-mère. Longtemps, j'ai ignoré son prénom.
Les mots « Déportation » et « Résistance » jaillissaient parfois du silence qui entourait son destin. Très vite, la pudeur reprenait ses droits. Le silence couvre la honte, la peur, la tristesse… Jusqu'à ce que je trahisse l’omerta en flanquant tout sur la place publique.
C’est une tentative de justice. C’est l’esquisse d’un hommage. C’est peut-être même l’éclosion d’une fierté.
Fiche technique
- Collection
- Œuvres au rouge
- Date de parution
- 2021
- Reliure
- Broché
- Format
- 21 x 14 cm
- Nombre de pages
- 150
« Grande, Seconde, celle de Trente Ans, l’enfance n’a que faire de ces détails alors qu’elle passe l’après-midi à jouer à la guerre, à mourir cent fois et à renaître autant de fois pour se lancer dans d’héroïques assauts, toutes armes confondues dans son arsenal, de l’épée au char d’assaut. »
« Le but importait peu. Seul le plaisir du récit, celui de la parole qui roule, se déroule, nage, fluctue, abonde en cascades, était l’enjeu de ces monologues que j’interrompais parfois pour demander des nouvelles de tel personnage abandonné sur la route. Une fois le pauvre hère récupéré, il repartait immédiatement vers un autre lieu et une autre aventure. Je m’endormais ébloui, les sens nourris par des visions colorées, des bruits de forêt, des cris d’animaux, de plaintes minérales, et autant de sensations qui finissaient par avoir raison de ma capacité à demeurer éveillé. »
« Ce que l’enfant ne pouvait mesurer, l’adulte pouvait le ressentir à l’aune des mots. Je percevais avec plus de netteté et de justesse la béance laissée par la disparition d’un père. »
« Les vies brisées sont de deux ordres, il y a celles qui basculent dans la maladie psychique et celles qui se poursuivent, malgré tout. »
« On ne choisit pas d’être résistant, on l’est ou on ne l’est pas. »
« L’intensité de certaines tragédies demande du temps pour entrer dans le champ de la réalité qu’un être peut supposer ou supporter. »
« La difficulté consiste à demeurer un homme au-delà de ce que les bourreaux vous infligent. La capacité à quitter le vertige de la souffrance et de l’humiliation, de résister à la tentation de supplier, est une des conditions de la survie. »